"L'intergénération, c'est facile : il suffit de mettre des jeunes et des vieux dans une même pièce!"
"L'intergénération, c'est vivre ensemble, donc c'est vivre, tout simplement... C'est super simple à mettre en place ! Il suffit de réunir des enfants et des personnes âgées, et ça marche tout seul !"
Cette posture, beaucoup d'animateurs l'ont déjà entendue, sur leur lieu de travail ou lors d'un repas avec des proches. Certains la reprenne d'ailleurs parfois à leur compte. Elle fait partie de ces représentations simplistes qui nuisent à la bonne compréhension du rôle des animateurs.
Vous avez dit "les malheurs du sophisme" ?
Ce discours peut sembler logique au premier abord pour le grand public. Pourtant, il s'agit d'un sophisme, un raisonnement fallacieux. Ici, il introduit un raccourci dangereux, laissant croire que la compréhension et la réalisation de l’intergénération se résument à une formulation simpliste et magique, accessible à tous sans aucun effort et immédiatement. Une confusion qui mène droit dans le mur !
Entre "ne rien faire" et "faire pour faire", il existe un autre chemin : comprendre ce qui se joue pour construire sur des bases solides et explorer le champ des possibles. Lorsque nous travaillons avec un public fragile en situation d'isolement social, il est essentiel d'adopter une posture réfléchie. Les personnes âgées partagent certaines caractéristiques liées au vieillissement, mais elles forment également un groupe très hétérogène sur les plans psychologique ou social notamment. Il revient donc aux animateurs de mettre en place des actions cohérentes, en évitant d'activer des freins puissants.
Pourquoi les sophismes sont-ils si séduisants ?
Parce que notre cerveau adore les solutions faciles... Il apprécie tout particulièrement :
Ce qui semble "évident".
Ce que "tout le monde dit" (ou une majorité), ou encore ce qui est énoncé par une personne perçue comme une autorité.
Ce qui conforte nos croyances préexistantes.
Comment les combattre ?
En apprenant à les repérer.
En restant humble face à ses propres limites et en s'informant sérieusement auprès de sources fiables.
En réfléchissant plutôt qu'en reproduisant aveuglément. L'inspiration est utile lorsqu'elle est adaptée à son contexte. Elle devient dangereuse lorsqu'elle se résume à imiter sans recul critique.
Nous avons tous des références culturelles, sociales et professionnelles qui nous sont propres. Elles ne sont que partiellement partagées avec les autres et la qualité de nos relations dépend de la manière dont nous les harmonisons ou les confrontons.
De l'opinion à la réflexion...
Concernant l’intergénération, chacun a une opinion personnelle qui permet de répondre à une question comme : "Pensez-vous qu’il est utile de mettre en relation des personnes de générations différentes ?". Cet avis, quel qu'il soit, est respectable. Car chacun a le droit d'avoir sa propre opinion.
Mais face à d'autres questions, des non-connaisseurs du sujet devront admettre des limites légitimes, comme par exemple :
Depuis quand parle-t-on d’intergénération ?
Pourquoi ce sujet a-t-il émergé alors qu’il semble naturel et simple à mettre en œuvre ?
Quels leviers permettent de redonner un rôle social positif aux personnes âgées fragiles ?
Quels sont les freins qui limitent ou empêchent l’intergénération ?
Comment concevoir des projets intergénérationnels qui aient du sens pour tous les protagonistes ?
Quelles sont les différences entre l’intergénération et la transmission ?
Une réelle dynamique, pas un cliché...
L’intergénération, ce n’est pas seulement produire des photos pour les réseaux sociaux ou des statistiques pour les rapports administratifs. C’est avant tout une véritable dynamique ! Ce n’est ni simpliste, ni automatique, ni standardisable. Et c’est une bonne nouvelle ! Pourquoi ? Parce que cela rend le sujet passionnant et porteur de sens. Réfléchir et s'informer, ce n’est pas difficile : c’est même plaisant et stimulant.
Pour conclure : ne confondez pas facilité et compétence(s)
Il est humain et parfois nécessaire de simplifier ce qui semble complexe. Cela peut être bénéfique tant que cela reste pertinent et sans conséquence(s) négative(s). Le danger réside dans une systématisation irraisonnée et dans l’illusion que tout est possible sans un minimum d'effort. C'est comme vouloir construire une belle maison en négligeant les fondations au profit de la décoration, sous prétexte que les premières ne se voient pas et empiètent à la fois sur le budget disponible et sur l'image que l'on renverra.
En comprenant ce que vous faites et pourquoi vous le faites, vous vous offrez la possibilité d’ajuster et d’optimiser vos actions. Cela vous permettra, avec l’expérience, de développer des compétences de plus en plus efficaces et fluides, qui vous procureront le sentiment d'une maîtrise croissante. Le développement de cette expertise vous rapprochera d'une certaine forme de "facilité" et cette fois, elle aura du sens et du fond !
Alors, prenez le temps de visionner les vidéos du congrès, de lire, d’échanger et de travailler sur ce sujet. Vous en retirerez un plaisir bien plus grand que celui de croire qu’il suffit de "mettre des jeunes et des vieux dans une même pièce" pour réussir des projets intergénérationnels !
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Rappel : un extrait de l'édito du congrès "Intergénération et transmission".
"Transmission, relations intergénérationnelles, utilité sociale et exercice de la citoyenneté font partie des demandes en croissance chez les personnes âgées. Qu’est-ce que la transmission au grand âge ? Pourquoi existe-t-elle ? Quelle signification et quelle utilité a-t-elle pour les personnes âgées ? Pour les autres ? Comment fonctionne-t-elle ? Comment se construit-elle dans l’intergénération ? Comment intergénération et transmission réactivent les rôles sociaux des anciens ? Et les rôles des plus jeunes lors de ces échanges intergénérationnels ? Où se trouvent les forces et les freins ? Comment faciliter les échanges entre les générations ? Qui les initie et qui les décide ? Qui les fait vivre ? Quels rôles y jouent les animateurs ?
La transmission des séniors sur le savoir-faire (en particulier professionnel) est connue pour les séniors de 55 à 75 ans. Ensuite ? Il ne transpire que le vide et l’inutilité, largement inspirés par l’âgisme de notre société. Les “très vieux” sont perçus comme n’apportant rien, étant devenus une “charge”, un “poids”, un “coût” pour la société. Sur le terrain, les animateurs et autres acteurs perçoivent les attentes, les potentiels d’utilité, les rôles souhaités, ils apportent des réponses. Face au pessimisme ambiant, il convient de rappeler que les anciens ont des attentes, qu’ils peuvent et veulent continuer à échanger, à participer à la vie sociale et culturelle de tous, que ces échanges apportent à tous, anciens et jeunes ! Les plus jeunes cherchent leurs racines, d’où ils viennent, et où ils peuvent puiser leurs références. Tous ces apports se construisent par l’échange, la complémentarité, la reconnaissance de l’autre et de son rôle, dans un vivre ensemble, une recherche de sens et de cohésion."